Quand nous nous questionnons sur notre époque, nous ne pouvons pas faire
l’économie de la réflexion sur le passé. Car c’est toujours par rapport au passé,
récent ou lointain, que nous définissons la modernité, que nous repérons les
changements et que nous déterminons en quoi résident les spécificités de telle
ou telle époque. Il est peu original de constater que l’héritage du XXe siècle
remonte, d’une façon ou d’une autre, jusqu’à l’âge classique. Il est vrai que
notre époque est tourné vers l’avenir, mais n’est-il pas instructif, voire édifiant
de regarder aussi en arrière et de (re)découvrir, dans les manifestations
littéraires, linguistiques, historiques, artistiques et scientifiques
contemporaines, les réminiscences d’un classicisme peut-être trop négligé
aujourd’hui ? Avec cet article, nous tenterons de donner une réponse positive à
cette question, en montrant un point de jonction pertinent entre le XXe siècle et
l’Antiquité.
À propos de l’héritage classique au XXe siècle, de nombreuses figures et
oeuvres remarquables viennent à notre esprit. Pour rester dans le domaine de la
littérature, pensons notamment outre Yourcenar, à Camus (Le Mythe de
Sisyphe, 1942 ; Caligula, 1945), Sartre (Les Mouches, 1943 ; Orphée noir,
1948), Cocteau (Orphée, 1926 ; Antigone, 1928 ; La Machine infernale, 1934),
Giraudoux (Amphitryon38, 1929 ; La Guerre de Troie n’aura pas lieu, 1935 ;
Électre, 1937), Anouilh (Eurydice, 1941 ; Antigone, 1944) et Supervielle
(Orphée, 1946). Toutefois parmi les oeuvres de ces auteurs, celles de
Marguerite Yourcenar (1903-1987) se distinguent par leur profondeur. Car, dès
sa jeunesse, elle plonge dans les cultures hellénique et romaine. Grâce à sa
formation non-conformiste assurée par son père, elle a eu la chance de
découvrir aussi ce qui n’était pas canonisé par les manuels scolaires.
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