’Épître aux Pisons d’Horace, transmis à la postérité sous le titre d’Art
poétique contient un vers demeuré très célèbre, une comparaison : Ut pictura
poesis qui signifie « la poésie est comme la peinture » ou « il en va de la poésie
comme de la peinture ». Selon l’auteur latin un poème particulier peut, comme
un tableau, nous donner une impression de plaisir grâce à un savoir-faire et un
tour de main particulier. Selon Horace la peinture fournissait donc un modèle à
partir duquel pouvait être pensé le poème. La citation a cependant été
détournée de son sens dès la Renaissance : les théoriciens classiques ont
renversé le schéma comparatif, en faisant au contraire de la littérature le
modèle de toute peinture.
Comme nous le savons, l’intervention du discours philosophique a été
déterminante dans l’élaboration d’une pensée artistique conférant à l’art une
fonction signifiante. C’est au XVIIIe siècle que prend naissance l’esthétique qui
devient petit à petit un domaine à part entière de la pensée philosophique. Mais
l’esthétique est déjà en germe dans les fragments du Traité de la peinture de
Léonard de Vinci. À cette époque ce n’est pas encore la philosophie, mais la
doctrine de l’Ut pictura poesis qui sert de principal argument à la revendication
picturale du « sens ». Cette caution esthétique est précisément alléguée à la
Renaissance, alors que se distend le lien très fort que le Moyen Âge avait
instauré entre texte et peinture, lien qui, s’articulant à partir de la Bible et de la
littérature religieuse, ne nécessitait aucune réflexion conceptuelle particulière.
La mode est au paragone, la « comparaison » entre les arts. Léonard de Vinci
affirme la supériorité de la peinture sur tous les arts, y compris la poésie, parce
qu’elle ne morcelle pas ce qu’elle représente, mais le donne à voir tout
ensemble.
Pour lire la suite de cet article, veuillez consulter le pdf ci-dessous.