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Edit BORS, Les formes du silence : analyse textuelle de Sur l’eau de Maupassant > 81

 

Dans cette nouvelle de Maupassant, un canotier raconte « une singulière

aventure » qui lui est arrivée. Un soir, l’ancre de son canot se trouve coincée, si

bien qu’il doit se résigner à passer la nuit à bord. Peu à peu, il se sent pénétré

d’inquiétude, d’angoisse et de terreur. Le brouillard l’enveloppe, puis se

dissipe, laissant place à des visions étranges. Au matin deux pêcheurs l’aident à

dégager l’ancre : ils ramènent avec elle « une masse noire » qui s’avère être le

cadavre d’une vieille femme, avec une pierre au cou.

La singularité de cette aventure consiste en le surgissement de sentiments

d’inquiétante étrangeté (Freud, 1985) suscités principalement par une

désorientation intellectuelle et sensorielle, qui, tout en transformant le connu en

inconnu, produit un dysfonctionnement au niveau de la perception et de

l’interprétation de la réalité.

Quelles sont les circonstances qui, en effaçant la frontière entre fantaisie et

réalité, suscitent l’angoisse, la peur et la terreur ? Freud parle de l’inquiétante

étrangeté du silence, de la solitude et de l’obscurité, et en fait, c’est cette triade

qui constitue la pierre d’angle de Sur l’eau de Maupassant : le personnage se

trouve seul, coupé de contacts humains, dans une situation où l’obscurité et le

silence produisent une désorientation visuelle et auditive accompagnée d’une

incertitude intellectuelle, voire un trouble mental provisoire dû à l’absence de

stimulus extérieurs sans lesquels, d’après Csíkszentmihályi (2007), la

conscience est jetée dans le chaos. Il est prouvé que, privé d’effets auditifs et

visuels, privé d’activités raisonnables, tout individu perdra tôt ou tard le

contrôle de ses pensées, et sera en proie à des sentiments d’incertitude, à de

vives inquiétudes et à des visions hallucinatoires.

 

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