AVANT-PROPOS

Zsuzsa SIMONFFY, Du lexique au style

Avant-propos > 7

Il est indéniable que les sciences du langage ont connu un renouveau
éclatant tant dans les vues théoriques que dans l’accumulation des données
linguistiques au cours des dernières décennies. Il conviendra de revenir dans le
cadre de ce colloque sur la vieille question concernant les rapports entre langue
et identité, lexique et société. Comment le linguiste accède-t-il à l’identité ?
Comment le lexique pourrait-il porter l’empreinte d’une culture ou d’une
société donnée ? Comment la langue peut-elle devenir une source principale
d’identité ou encore de connaissance sur la culture d’une communauté ?
Nos interprétations sont conditionnées par des présupposés socioculturels et par
les points de vue adoptés qui apparaissent dans les mots. Se proposer de saisir
le sens des mots en les insérant dans le contexte culturel qui contribue à leur
définition ne va pas de soi dans une zone de contact de langues où se côtoient
diverses variétés linguistiques.
Le colloque prétend apporter quelques éléments de réponse aux questions
concernant l’expression des identités à travers la langue suivant les enjeux
culturels, littéraires, sociopolitiques ou pédagogiques. La réflexion que souhaite
susciter le colloque s’organisera autour des axes suivants : dans nos pratiques
d’interprétation de tous les jours, qu’il s’agisse d’un article lu dans un
quotidien, d’une conversation, d’un texte savant ou d’un roman, il n’est pas rare
que nous recourons à un dictionnaire pour vérifier la signification d’un mot.
Mais qu’est-ce que nous trouvons dans un dictionnaire ? Le colloque invite à
réfléchir sur la question de savoir comment aborder l’étude du sens des mots ou
des expressions à travers des indications que nous fournissent les dictionnaires
unilingues ou bilingues. Les qualificatifs comme historique, étymologique,
figuré, métaphorique, dénotatif, connotatif sont-ils réellement censés qualifier
le sens ?
Dans nos pratiques d’interprétation, les indices de la personne,
les modalisateurs, les appréciatifs ou dépréciatifs permettent de révéler la
présence de l’énonciateur dans son énoncé et de lui attribuer les points de vue
qui orientent cet énoncé. Or, l’énonciation est souvent piégée par l’implicite,
le présupposé, le discours rapporté, l’ironie, etc. Nous proposons de nous
interroger sur les marques de l’énonciation dans les mots, que ce soit à partir du
dépouillement des dictionnaires existants ou en vue de construire de nouveaux
dictionnaires, sans exclure néanmoins les corpus littéraires ou des bases de
données.
Les questions peuvent porter également sur l’organisation lexicale des
langues dans une optique théorique, comparative ou autre, sur l’identification
des champs lexicaux présents dans un texte ou discours, propres à un certain
type de discours. Repérer les champs lexicaux dans un texte et étudier les
rapports entre eux nous permettra aussi de révéler l’esthétique ou le style d’un
auteur.
L’introduction de la notion de collocation a ouvert une nouvelle perspective
dans l’étude du lexique par rapport à la perspective syntaxique. Si dans le
domaine de la lexicologie, la collocation renvoie aux relations entre unités
lexicales, permettant de trancher entre polysémie et homonymie, il serait
intéressant de réfléchir sur la question de savoir quelles informations
collocationnelles peuvent entrer par exemple dans un dictionnaire.
_________________________
ZSUZSA SIMONFFY
Université de Pécs
Courriel :
simonffy.zsuzsanna@pte.hu