Ramcy KABUYA, Que reste-t-il de l’oralité dans la littérature africaine contemporaine ? > 13
La notion d’oralité présente un enjeu particulier dans le champ de la critique littéraire
africaine. Cette importance nécessite que l’on en interroge les aspects diachronique et
synchronique. C’est pourquoi il s’agira ici d’évaluer ce qui pendant de nombreuses années
a été présenté comme l’étymon spirituel de la littérature africaine. Dans cette optique, il ne
s’agira pas uniquement d’un mode de lecture qui consiste à repérer dans le texte des traces
d’oralité, mais aussi la place de cet héritage dans l’imaginaire actuel. Mohamadou Kane
écrivait à propos de l’histoire de la littérature africaine que « la question demeure de savoir
s'il existe une spécificité noire pour pouvoir en suivre les mutations dans l'histoire.
Comment existe-t-elle ? Sous quelle forme ? Est-elle immuable, toujours identique à ellemême,
à travers les âges et sous toutes les latitudes ? Autrement dit, un Belge aurait-il pu
écrire les Soleils des Indépendances, un Japonais Hadriana dans tous mes rêves ? Mieux,
Ahmadou Kourouma aurait-il écrit le même livre avec trente, cinquante ans de recul ?
L'africanité ou la spécificité nègre — si elle existe — n'est-elle pas redevable à l'histoire ?
Le rapport de l'oeuvre à l'oralité, pour ne retenir que cet exemple, est-il immuable ?
L'oralité est-elle fixée à tout jamais ? »
Une meilleure façon de répondre à ces questions est de considérer l’évolution du
concept d’oralité et de voir comment elle a influencé la pratique littéraire. Il me paraît
pertinent d’intégrer qu’un changement de regard sur cette notion, la fait passer d’un univers
traditionnel lointain vers une réalité tout à fait moderne. Pour se faire, il faudra, passer en
revue les principales significations qu’elle a revêtues ou à tout le moins, les deux
principales orientations théoriques et méthodologiques qu’elle convoque.
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