László MÉSZÁROS

László MÉSZÁROS, Le futur dans le passé... > 63

 

1. D’une manière générale, le système des temps verbaux français, y compris la concordance des temps, présente des difficultés aux hungarophones désireux d’apprendre cette langue ou d’en faire une description grammaticale. À ce titre, il est significatif de voir ce que dit Aurélien SAUVAGEOT d’un Hongrois qui a appris à maîtriser le français à la perfection ou presque, en parlant d’Albert Gyergyai : « Il s’exprimait en un français presque parfait. Je ne l’ai guère pris en défaut, qu’une fois ou deux seulement, quand il lui était arrivé de laisser échapper un imparfait au lieu d’un plus-que-parfait. Mais il est si difficile pour un Hongrois de disposer sa pensée dans le cadre des temps du verbe français ! » SAUVAGEOT, A. (1988 : 61). Il faut croire que cette constatation doit être prise au sens large, pour l’ensemble des hungarophones, à l’exception tout de même de Madame Jolán Kelemen qui est arrivée à la perfection tant au niveau de son parler personnel qu’au niveau des nombreuses analyses qu’elle a données du système verbal du français.

2. Les recherches de Madame Jolán Kelemen donnent aux étudiants, aux professeurs ou aux linguistes de solides repères sur l’utilisation des temps verbaux français. Sa façon perspicace de concevoir cet ensemble cohérent qu’est le système des temps verbaux du français nous incite à poser des questions chaque fois qu’il subsiste des incertitudes de terminologie ou d’explication dans l’usage et/ou dans l’enseignement du français langue étrangère. Ainsi les élèves des lycées, mais aussi des facultés en Hongrie ressentent-ils comme incertitude l’existence d’une forme verbale spéciale en « -rais » correspondant au « conditionnel » qui est considéré tantôt comme un mode, tantôt comme un temps verbal. (Le terme « forme en -rais » est employé par de nombreux linguistes pour désigner le conditionnel-temps, souvent dénommé futur dans le passé et le conditionnel-mode, ou conditionnel tout court ; à titre d’exemple nous donnons deux références : DUBOIS, J.–LAGANE, R. (1973 : 126), et ARRIVÉ, M. et alii (1986 : 276-277). Pour les apprenants, mais aussi dans la plupart des cas pour leurs professeurs, la difficulté vient du fait que lorsqu’ils en arrivent à l’apprentissage du style indirect, avec passage du champ temporel du présent au champ temporel du passé, du fait de la présence d’un verbe de la principale au passé, on est confronté à l’incohérence des éléments d’une série composée de trois « règles de transformation » : en passant du discours au récit, c’est-à-dire du style direct au style indirect et du présent au passé au niveau de la principale, on remplace le plus souvent le présent de l’indicatif par l’imparfait, le passé composé par le plus-que-parfait et le futur simple par une forme dont le nom précisément prête à confusion. En effet, lorsque le professeur dit aux élèves de mettre un conditionnel présent à la place du futur simple, c’est acceptable au moins pour la forme, mais lorsqu’il dit que c’est un futur dans le passé (tout au long de cet article tout ce que nous disons au sujet du futur dans le passé, est valable – mutatis mutandis – au futur antérieur dans le passé, sans que ce dernier soit développé), les apprenants sont dans l’incertitude : pourquoi apprendre deux séries de formes verbales sous des noms différents, alors que leurs formes sont identiques, ou bien si cet emploi particulier du conditionnel a un nom spécial, pourquoi ne pas donner un nom spécial aux autres éléments de cet ensemble bien déterminé que sont ces trois règles de transformation ?

 

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