Miklós PÁLFY

Miklós PÁLFY, Mots composés dans le nouveau dictionnaire hongrois-français > 83

 

1. Les dimensions d’un dictionnaire sont déterminées tout d’abord par sa nomenclature (le nombre des entrées), mais aussi par le nombre des données lexicographiques, c’est-à-dire par la « profondeur » des articles. Pourtant, ce deuxième critère n’intéresse guère les usagers dont la critique dépend en premier lieu du degré d’exhaustivité de la nomenclature, qu’il s’agisse d’un « grand » dictionnaire ou d’un dictionnaire de taille moyenne.

Les éditeurs ont souvent intérêt à augmenter le nombre des entrées pour des raisons publicitaires. Or, la nomenclature peut très bien être gonflée par des mots démodés ou tombés en désuétude (icelui, moult, occire), par des régionalismes (chaussinette, débarbouillette, gineste) aussi bien que par des mots très rares (bégum, kibitka, lycanthropie, maharani), et par des néologismes (stagflation, tapuscrit), souvent créés au hasard par les médias. Ce dernier type de mots peu nombreux en français fourmillent pourtant en hongrois grâce à la grande productivité de la formation des mots et la question se pose de savoir quels mots composés enregistrer dans un dictionnaire bilingue d’usage général. Le lexicographe ne peut pas se passer de ce problème, étant donné, d’une part, la grande quantité de ce type d’unités lexicales, et, d’autre part, leur fréquence dans la presse et leur actualité dans la vie quotidienne.

Quant aux mots composés, il existe des opinions selon lesquelles il ne faut enregistrer que ceux dont le sens ne peut pas être deviné à partir du sémantisme des éléments : on n’a donc pas besoin, dans un dictionnaire hongrois-français, des entrées suivantes : « autóbuszjárat », « autóbuszjegy », « autóbusz-közlekedés », « autóbusz-megálló », « autóbusz-menetrend », « autóbusz-pályaudvar », « autóbuszsofőr », etc., tous mots parfaitement « transparents ».

Dans ce petit exposé, nous nous opposerons à cette façon de voir. C’est que cette conception ne prend en considération que la fonction de décodage (ou fonction passive) des dictionnaires en général, en oubliant qu’une bonne partie des usagers devraient pouvoir utiliser leur dictionnaire dans le sens actif ou productif : ainsi, l’usager hongrois d’un dictionnaire hongrois-français a besoin surtout de la fonction d’encodage. « Autóbusz », c’est ou bien autobus ou bien autocar en français, selon qu’il s’agit de circulation urbaine ou de circulation interurbaine. Les équivalents de « jegy » et de « sofőr » dépendront de l’autre élément : on dit en effet « ticket d’autobus », mais plutôt « billet d’autocar », et on dira de la même façon « conducteur d’autobus » et « chauffeur d’autocar ». Dans le sens passif, l’usager francophone pourra tout de suite « deviner » les équivalents des entrées « autóbuszjegy » et « autóbuszsofőr », mais dans le sens actif, l’usager hongrois ne sera pas du tout informé de la possibilité du double encodage. Et on n’a pas encore parlé de la surprise des hungarophones qui doivent apprendre que « autóbuszpályaudvar », c’est gare routière en français, « lexie » composée dans laquelle il n’y a même pas d’« autóbusz- ».

 

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