Witold MAŃCZAK

Witold MAŃCZAK, Origine des langues romanes > 57


La thèse A a été émise en 1435 à Florence lorsque quelques humanistes, que personne n’oserait considérer comme des linguistes, ont discuté la question de savoir d’où provenait l’italien. N’oublions pas que cela se passait bien avant le XIXe siècle, qui a eu le grand mérite d’introduire la notion d’évolution dans différentes disciplines, y compris la linguistique. Avant le XIXe siècle, on avait une vision du monde sensiblement statique: on s’imaginait, par exemple, que toutes les espèces végétales et animales existaient depuis le début du monde. Nos humanistes se rendaient parfaitement compte, pour leur part, d’une différence entre l’italien et le latin, l’un étant, comme on dirait aujourd’hui, une langue analytique et l’autre, une langue synthétique. De même qu’ils étaient incapables de s’imaginer que les plantes et les animaux sont le résultat d’une évolution, de même il leur paraissait inconcevable qu’une langue synthétique puisse se transformer en une langue analytique ; sachant que chez des auteurs romains il y avait quelques vagues allusions à un vulgaris sermo, ils sont arrivés à la conclusion que, dans l’ancienne Rome, il devait y avoir deux langues : le latin classique, langue synthétique, et le latin vulgaire, langue analytique et source de l’italien. Les arguments que nos humanistes alléguaient à l’appui de leur thèse étaient extrêmement naïfs (par exemple, une femme du peuple n’aurait pas été capable d’apprendre à décliner un substantif comme supellex, gén. supellectilis), mais, par inertie mentale, l’opinion formulée en 1435 par quelques ignorants médiévaux a été répétée par d’innombrables autorités et est devenue un dogme de la linguistique romane.


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