Ágnes HORVÁTH

Ágnes HORVÁTH, La traduction littéraire, une autre forme d’imitation : Ady et Baudelaire > 37


 Mon propos sera d’examiner la question de savoir pourquoi Ady ressent comme un besoin impératif de « traduire » du Baudelaire en hongrois pour, ensuite, « insérer » trois sonnets dans son recueil de poésies qui porte le titre significatif de Új versek (Poèmes nouveaux), significatif, car, en effet, ceux-ci ont créé cet hugolien « frisson nouveau ».

Le choix de les avoir insérés dans le recueil J’aimerais être aimé (Szeretném, ha szeretnének) avec, en outre, un poème d’amour de Sappho, les Strophes de Jehan Rictus, et le Rêve familier de Verlaine (qui est comme un tour de force, mais j’y reviendrai encore) est un choix éloquent. Par là, il les fait siens dans deux sens : il se les assimile et, pour nous exprimer d’une façon plus vulgaire, il les vole quasiment, si, par vol, on entend le fait de considérer comme sien quelque chose qui, en fait, ne l’est pas. On criera donc au plagiat ? Eh bien, non. Mais, du coup, nous voilà à la problématique du pastiche. En quoi au fond, la traduction et le pastiche, ont-ils quelque chose en commun ?

Pour deux points : pour la motivation et le but visé. Sans vouloir pousser plus loin, j’oserai affirmer que les deux activités partent d’une motivation identique, notamment de la rencontre de deux créateurs, d’une parenté ou affinité qui existe entre eux. On pourrait dire, une sorte de retrouvailles à travers le temps ou à travers l’espace. Sans cela, ni pastiche, ni traduction ne seraient possibles. En pastichant un auteur, le pasticheur cherche chez lui justement ce point « qui lui dit quelque chose » qui le pique au vif. Le point de vue commandant le choix reste dans les deux cas le même : similitude ou, au contraire, éloignement dans l’attitude, dans le style, dans la vision, etc. Mais il faut bien que cet éloignement soit excitant, donc inspirant.

Le but est également le même au moins dans le cas célèbre des Pastiches proustiens. Pastiche et traduction, tous les deux sont exorcisation ou idoloclasme. Une fois touché, entamé, pour ainsi dire mordu, l’idole perdra du coup son empire absolu sur le pasticheur ou le traducteur. À propos des pastiches de Proust, Jean-Yves Tadié dit ceci : « il se délivre de ses maîtres. » Il s’agit donc d’un désir, d’une volonté de se délivrer d’un poids souvent écrasant.

 

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