Tivadar GORILOVICS

Tivadar GORILOVICS, Classicisme et romantisme vus par Villemain > 27

 

Dans cette nouvelle Querelle des Anciens et des Modernes qui divise la France littéraire de la Restauration, dans le feu de la « bataille romantique » qui oppose ceux qu’on appelle alors les « classiques », gardiens de la tradition, aux partisans du renouveau qui prêchent au contraire l’absolue nécessité du changement et luttent en dernier ressort pour la reconnaissance du principe de liberté dans les arts, il était inévitable de voir se poser le problème de l’originalité et de l’imitation, un problème en rapport de contiguïté avec celui de la modernité, non moins fondamental pour le romantisme. « Qui dit romantisme, dit art moderne », concluait Baudelaire en 1846, de manière déjà rétrospective, en dotant d’ailleurs cette modernité d’un contenu précis. Or, dans ces polémiques dont le célèbre article de Ludovic Vitet, en 1825, résumait si bien l’enjeu : « le goût en France attend son 14 juillet », pour la première fois dans l’histoire de la critique française, on assiste à l’intervention d’une nouvelle catégorie de critiques de métier, les professeurs d’Université. C’est là une grande nouveauté : à côté de la corporation des journalistes, on voit en effet se constituer celle des professeurs, qui va pratiquer ce que Thibaudet appelait encore la « critique littéraire de la chaire » et qu’on appelle de nos jours la critique universitaire. Ce qui, à en croire ce même auteur, distingue, du moins en principe, la critique journalistique de la critique universitaire, c’est que « des deux grandes sections du personnel critique, l’une, celle des professeurs, est préposée à l’inventaire du passé, l’autre, celle des journalistes, au discernement du présent », d’où l’opposition et la rivalité de ces deux catégories. En réalité, la tentation a toujours été grande chez les professeurs de s’exprimer sur la littérature vivante, contemporaine, soit incidemment, comme entre parenthèse, tout en restant attaché à l’étude du passé (c’est ce que nous verrons dans le cas de Villemain), soit en intervenant délibérément dans des débats d’actualité, à la manière de Désiré Nisard, publiant son Manifeste contre la littérature facile ou ses Études de moeurs et de critique sur les Poètes latins de la décadence, dont toute la pesante érudition a viséun rapprochement entre la poésie de l’époque de Lucain et celle de [son] temps ; car ce rapprochement, expliquait-il, est la seule moralité que je puisse tirer de mon livre, et je ne dissimule pas d’ailleurs qu’un examen de tous les jours de notre poésie contemporaine m’a fort souvent servi à expliquer l’époque de Lucain.

 

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