Veronika SZEPESI

Veronika SZEPESI, Parodie et pastiche littéraires... > 121


Parodie et pastiche littéraires – Rupture avec le passé ?

Entre 1908 et 1912, en France et en Hongrie, les nouveautés littéraires les plus célèbres sont nées des genres de la parodie littéraire et du pastiche. En France, Paul Reboux et Charles Muller1 font paraître leur recueil de pastiches de 15 auteurs français en 1908. En 1910, année de la deuxième édition de À la manière de… en France, est paru le recueil de parodies de Frigyes Karinthy intitulé Így írtok ti. Comme Reboux et Muller, Karinthy avait pour but de critiquer la littérature contemporaine. Partant des conditions de la vie littéraire en Hongrie et en France au début du siècle, on se propose ici de comparer À la manière de… de Reboux et Muller à Így írtok ti de Karinthy, pour déterminer quelles étaient les exigences du pastiche et de la parodie littéraire à la Belle Époque.

En Hongrie, le public et les critiques ont fait l’éloge du livre de Karinthy, et du genre de la parodie. Jusqu’à nos jours, analyses et monographies sur Karinthy se succèdent, alors qu’en France, Reboux et Muller n’ont pas de critique du tout. La question se pose : pourquoi l’histoire littéraire française ne juge-t-elle pas l’oeuvre de Reboux et Muller digne d’analyse, pourquoi la bibliographie du pastiche est-elle aussi courte, alors que les recueils d’À la manière de… ont connu un énorme succès de public.

Tout d’abord, la question du genre: comment distinguer pastiche et parodie ? Comme la plupart des ouvrages théoriques, le Dictionnaire des littératures de langue française relève trois éléments de définition : « la parodie peut être distinguée du pastiche en ce qu’elle critique, dans une intention de dérision, certains des traits caractéristiques du texte imité ». Le pastiche, par contre, est surtout l’imitation du texte-modèle. Mais distinguer les deux genres à partir du trait critique pose problème, car par exemple Proust, pour qui la pratique du pastiche était une activité constante, parle de « critique littéraire en action » à propos du pastiche.

Le même problème se posera si on tente de distinguer les deux genres à partir de l’intention de dérision. Car l’histoire littéraire classe À la manière de… de Reboux et Muller parmi les recueils de pastiches. Le Dictionnaire des littératures de langue française le cite aussi comme un exemple de pastiche, mais plus bas il parle de son « intention parodique ». Aussi vaut-il mieux renoncer pour l’instant à la distinction stricte des deux genres. Bien que À la manière de… soit défini comme recueil de pastiches et Így írtok ti comme recueil de parodies, on peut les placer sur le même plan, en partant de l’intention critique, qui, d’ailleurs, prend souvent la forme de la dérision.

 

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