Éva MARTONYI, La lutte avec l’Ange dans l’œuvre d’Henry Bauchau > 119
En face de La lutte avec l’Ange, de Delacroix, je me suis demandé où était ma
place actuelle. C’est le vertige, en ébranlant mes fondations, qui me l’assigne. Je
dois lutter avec lui et demeurer sur la réserve de façon à entendre ce qu’il a à me
dire. Être à la fois en Jacob et dans l’Ange tout en n’oubliant pas que je suis
vieux maintenant, tout en étant encore un enfant. Il faut donc que je renonce à la
merveilleuse assurance de chacun des deux combattants pour être au plus près
de ce qui est entre eux. Le plus important dans la lutte avec l’Ange, c’est
l’espace entre les deux combattants. Je ne suis pas cet espace, je suis en lui.
Henry Bauchau, illustre écrivain belge (né à Malines en 1913) revient, d’une
façon quasi obsessionnelle, à la contemplation du tableau de Delacroix,
représentant la lutte avec l’Ange à l’église Saint-Sulpice à Paris. Le plus
important pour lui dans la lutte avec l’Ange est qu’il s’agit « d’un moment
capital, obscur et mystérieux de la vie. Elle doit être soutenue, peut-être
plusieurs fois et dépassée. C’est ce qui advient à OEdipe ».
D’après certains critiques, le combat serait une allégorie de l’écriture chez
Bauchau, car écrire, c’est entrer dans une certaine permanence, se tenir dans le
mouvement de la lutte, s’installer dans son irrésolution pour maintenir une
tension indispensable, celle d’une naissance ou d’un jaillissement permanent.
Ce qui nous intéresse ici c’est cette curieuse conjugaison des deux
« mythes », celui de Jacob et celui d’OEdipe, dans l’oeuvre de l’écrivain. Venu à
l’écriture relativement tard et uniquement grâce à sa psychanalyse, Bauchau
envisage l’écriture non seulement comme une série de récits contenant des
allusions bibliques et culturelles en général, mais aussi et avant tout comme une
écriture de soi, sous des formes très variées, allant de la poésie au roman en
passant par le théâtre.
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