Virág PATAKI, Le tombeau idéal ou les hommages funèbres de Mallarmé > 207
L’ensemble des tombeaux poétiques de Mallarmé constitue un chapitre important de sa poésie de circonstance. De cette poésie de circonstance dont il importe précisément de souligner la dimension propre au sein d’une oeuvre apparemment double, où – à la lumière des projets ambitieux du poète – le statut de cette forme de poésie reste, certes, problématique. Si j’ai choisi d’isoler au sein des poèmes commémoratifs (toast funèbre, hommages ou tombeaux) les trois tombeaux proprement dits (Le Tombeau d’Edgar Poe, Le Tombeau de Charles Baudelaire et le Tombeau dédié à Paul Verlaine), c’est que ces textes – outre la forme identique du sonnet et le fait qu’ils sont tous adressés à un poète – présentent plus d’un caractère en commun et notamment un certain schéma imaginaire qui commande leur composition.
Le Tombeau d’Edgar Poe est, certes, antérieur d’une vingtaine d’années aux deux autres poèmes et, par sa date de production (1876) ainsi que par son ton et sa rhétorique s’apparente plutôt au Toast funèbre, mais il partage également plusieurs aspects des deux autres tombeaux. Le premier des hommages funèbres, Toast funèbre, écrit en 1873 à l’occasion de la mort de Théophile Gautier, et faisant partie de l’hommage collectif dédié à la mémoire de ce dernier, se distingue par son développement rhétorique et par sa forme adoptée, conforme en celle-ci aux propositions de départ de Catulle Mendès, qui donnait des instructions très précises aux contributeurs du recueil1.
Dans la présente étude il s’agira de mettre en lumière ce principe de construction commun aux tombeaux dont il était question plus haut et d’éclairer l’opération par laquelle l’auteur, tout en adhérant à une tradition et en gardant les éléments quasi obligatoires dictés par les contraintes génériques, les conjugue d’une manière originale en y laissant filtrer ses propres préoccupations.
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